Au bout du monde à Puerto Williams

L'amour est dans la montagne !

Puerto Williams, un nom qui ne résonne pas forcément. Inconnu à notre bataillon jusqu’à Puerto Madryn, les quelques informations que nous avons récupérées à son sujet nous ont plu, et nous ont donné envie d’y aller, à cette petite ville sur l’Isla Navarino, méconnue alors qu’elle est pourtant la ville la plus australe au monde. Le chemin pour y arriver n’est pas le plus simple, mais c’est le prix à payer pour réellement arriver au bout du  monde… Et c’est un détour qui en vaut largement la peine !

 


 

MapIl suffit de regarder la carte du monde pour se rendre compte qu’il existe bien une ville plus au sud d’Ushuaia. Pourquoi s’approprie-t-elle donc le nom de la ville la plus australe au monde ? Pour attirer et garder les touristes dans son rayon. Puerto Williams, petite ville sur l’Isla Navarino, au sud donc d’Ushuaia, est une ville chilienne, et cela arrange bien les argentins de maintenir le commerce du tourisme dans leurs terres car cela, référence au dernier article, est bien rentable !

 

On le ressent bien lorsque l’on commence à chercher à rejoindre Puerto Williams. « Pourquoi voulez-vous y aller ? Que voulez-vous y faire ? Il y a plus de choses à faire ici, vous devriez rester à Ushuaia. » Il y a bien une « gueguerre » Argentine – Chili en Terre de Feu. Mais impossible de nous démonter, on veut y aller, point final, on ira !

 

Notre embarcation ...

Notre embarcation …

Le seul moyen d’y aller d’Ushuaia est via une agence qui traverse le canal de Beagle avec un petit zodiac (la traversée dure 30 min). Seulement ce petit zodiac ne sort pas lorsque le vent souffle, ce que arrive assez régulièrement, et officieusement il n’aime pas trop naviguer lorsqu’il n’est pas plein…

 

Ce qui nous vaudra bien 3 jours bloqués à Ushuaia en attente de pouvoir partir, car la « tempête » du vendredi ne permettait pas la traversée (il a fait grand soleil sans vent ce jour là…), et le bateau ne travaille pas le dimanche… On aura essayé pendant ce temps de trouver une embarcation arpentant les ports de plaisance d’Ushuaia, mais sans succès.

 

Puerto Navarino

Puerto Navarino

Le lundi, on reçoit un message comme quoi le bateau allait traverser. Rdv à 15h au port, on passe l’immigration, et on attend le bateau. 1h30 plus tard, le petit zodiac est là et on embarque, bien plein, les 7 places sont occupées ! La traversée nous ramène à Puerto Navarino, où il n’y a rien si ce n’est un embarcadère et un poste de garde. On sent déjà bien que les structures sont bien plus légères qu’à Ushuaia, l’effet bout du monde sûrement. On attendra là 1h30, le temps que le mini bus qui doit nous ramener à Puerto Wiliams arrive, avec à son bord un agent de l’immigration chilienne qui était pris car un avion venait d’arriver et qu’il ne pouvait pas être à deux endroits au même moment (logique…). Un coup d’oeil sympathique dans les sacs, et on roule jusqu’à Puerto Williams, 1h30 de route gravillonnée où l’on a la chance de découvrir la nature sauvage de l’île, luttant contre la fatigue et en y succombant un peu …

Premier pa sur l'Isla Navarino

Premier pa sur l’Isla Navarino

Match Chili - France au sommet !

Match Chili – France au sommet !

 

 

 

 

 

 

 

Puerto Williams

On arrivera vers 20h à Puerto Williams, un agent gouvernemental viendra exprès pour nous tamponner les passeports. On demandera à la chauffeur du mini-bus si elle connait El Padrino, une auberge dont nous avons entendu parler. « Ah ! Chicha ! Si, la llamo ! » Quelques minutes plus tard, Cecilia, alias Chicha, arrive et nous embarque dans sa limousine comme elle l’appelle (du bout du monde la limousine, s’il vous plaît !) Les sacs dans le coffre, et nous avec, avec les restes des trucs qu’elle trimbalait juste avant. Les Pan Amasado (pains chiliens) sur le tableau de bord, l’odeur arrive à mes narines (Manu), une tonne de souvenirs passent devant mes yeux, la bassine pleine de « pansitos » tout chauds sous la serviette qui les maintenait au chaud, que Mamita venait de préparer, et je sens la salive envahir ma bouche ! Je me sens un peu chez moi, c’est un peu mon pays ici, et aussi difficile que ce soit de clairement l’expliquer, je suis infiniment content d’être là.

 

El Refugio del Padrino !

El Refugio del Padrino !

Cecilia nous ramène jusqu’au Refugio del Padrino, la sorte d’auberge qu’elle tient, et qui ressemblera en fait bien plus à un refuge qu’à une auberge. Café, pan amasado, Cecilia nous impose de nous détendre un peu, l’ambiance semble conviviale, beaucoup de français dans le refuge, qui cuisinent, discutent, planifient les treks (randonnées) qu’ils prévoient de faire.

 

 

Car Puerto Williams est un véritable repère de Trekkeurs, les gens viennent ici principalement pour randonner, et particulièrement le circuit des « Dientes de Navarrino », reconnu pour être le circuit le plus difficile de toute l’Amérique du Sud. On s’était pas mal renseignés sur les randonnées à faire, et sur les Dientes, mais notre expérience de débutants en randonnée nous a guidé sur un trek un peu plus facile (encore que…) afin de ne pas prendre de risques inutiles.

La principale difficulté des treks sur cette île provient du fait que les sentiers sont très peu marqués, donc facile de se perdre, et sur les conditions climatiques très changeantes allant aux extrêmes. Par contre, on peut jouir d’une nature vierge magnifique d’où l’on peut vraiment ressentir la Terre de Feu, mystérieuse, froide, majestueuse.

Les quelques échanges au refuge le soir même nous décident à partir sur le sentier du Lago Windhond, situé au sud de l’île. 4 jours, si on veut prendre le ferry qui nous ramènera à Punta Arenas le samedi, cela veut dire qu’il faut partir… Demain !! (On est pas là pour déconner !!)

 

Le plan de Puerto Williams !

Le plan de Puerto Williams !

On se regarde, échangeant ainsi beaucoup de messages sans dire mot, c’est parti ! On remonte chercher Ute, une allemande avec qui nous avons sympathisé pendant le trajet, pour lui proposer de faire le trek ensemble. Elle accepte avec joie car elle n’était pas enchantée d’aller randonner seule dans ces conditions. On se prépare un plan de bataille en 2-2, on fait les courses, on planifie, et on se donne RDV pour le départ du lendemain matin. On perdra un temps cher le matin même car la seule boutique de matériel de randonnée était fermée, et nous avions besoin de sac de couchage, des vrais, des trucs de 2,5kg qui vont à -2° / -7° (oui oui, c’est l’été ici !!). Les sacs à dos sont horriblement lourds, et on se demande déjà si ça va être gérable, partir à peine arrivé sur l’île…

 

C’est bon, on y va !! C’est par où au fait ? (On perdra une heure de plus à trouver…) Soit un départ sur le bon chemin à 14h … Ayayay….

 

Trek Lago Windhond

 

Début de la randonnée vers le logo Windhond

Début de la randonnée vers le logo Windhond

Le début du chemin n’est pas très compliqué, sentier bien visible dans la forêt bien boueuse mais qui protège de la pluie qui ne nous lâchera pas de la journée. Au bout de 2 heures, on arrive au fond la vallée, il n’y a qu’à chercher les marqueurs sur un terrain presque plat ! Oui mais ! Le vent fort, la pluie et le sol, marécageux au possible, l’eau gelée arrivant aux chevilles, ne facilitent pas la progression. Surtout que les marqueurs sont parfois bien cachés… La question que chacun du groupe se posera en douce : « qu’est-ce qu’on fait là nomdidiou ??!!…. ».

 

 

 

 

 

Notre passage préféré : que de l'eau partout ...

Notre passage préféré : que de l’eau partout …

On continue et on commence à monter vers les collines du fond afin d’arriver sur une autre vallée, ce en passant par quelques lacs, qui nous donneront des panoramas magnifiques sur la vallée et sur le canal de Beagle avec les montagnes argentines en fond, ainsi que sur la chaîne des fameuses Dientes pour lesquelles le soleil nous fera le plaisir de sortir un ou deux rayon (mais pas plus ! …). Petite pause, il est déjà 19h, et la fatigue commence à se faire bien sentir. Impossible de camper ici, autant planter la tente dans l’eau !

 

 

 

Le sol de cette région est très (très !!) marécageux, bien que l’on grimpe sur les collines, même sur un sol bien pente, le sol est gorgé d’eau qui ressort à chacun de nos pas. Cela provient de principaux phénomènes :

– le froid empêche les plantes mortes de correctement de dégrader, ce qui provoque par accumulation un effet « mou » du sol pouvant aller jusqu’à 50cm sans problème,

– les castors, introduits en 1946 pour leurs fourrures, posent aujourd’hui un sérieux problème car n’ayant aucun prédateur, ils se reproduisent, ravagent les forêts de l’île et leurs barrages détournent les cours d’eau, les lagons qu’ils créent saturent les nappes phréatiques.

 

Soit, on marche une heure et on essaie de trouver un coin pour camper. 1h plus tard, on se redit la même chose, sans trouver… Finalement, on s’arrêtera aux abords du lago Faghani, vers 21h30, complètement épuisés, le soleil se couchant, et posant les tentes sur un sol assez plat, mais impossible de quitter nos chaussures trempées : le sol est spongieux au possible… Et impossible de faire un feu…

 

Premier repas gelées : polenta, fromage et salami !

Premier repas gelées : polenta, fromage et salami !

La courte soirée fut un peu difficile, le froid nous gèle les mains, le visage et les pieds, et Manu sent un genou le lancer fortement après la longue journée de marche. On cuisinera rapidement et nous irons rapidement nous coucher. Les sacs de couchage loués nous sauveront bien la mise car ils apporteront la chaleur convoitée, mais Manu jonglera de douleur toute la nuit à cause du genou. La question se posera au matin, il faudrait marcher la même chose pour arriver au Lago Windhond le lendemain, puis 2 jours pareils pour revenir…

 

On décidera d’abandonner de peur que la douleur se transforme en quelque chose de pire, mais sans rentrer pour autant. On laissera les tentes et les sacs à dos pour partir marcher la journée et picniquer au plus loin où nous serons allés, environ au 2/3 du chemin jusqu’au Lago Windhond. On profitera de la journée (sans trop de pluie) à observer la nature, nous aurons l’occasion de voir planer au dessus de nous 2 condors, à se reposer et prendre un bon repas le soir dans une bonne ambiance.

e retour... sur notre passage préféré...

Le retour… sur notre passage préféré…

Le lendemain, on attaque le chemin du retour sous la neige. Super pour rentrer la tente !! On avancera un peu plus rapidement car nous nous rappelons du chemin. Le vent et la neige nous masqueront les vues, une pensée pour ceux qui font les Dientes à ce moment, on ne les voit presque plus sous la brume, et on se dit qu’ils doivent en prendre là haut. On repassera par les mêmes endroits (quel bonheur !) mais nos chaussures déjà imbibées n’auront plus peur de rien.

 

Un petit feu le dernier soir : grand réconfort !

Un petit feu le dernier soir : grand réconfort !

On s’arrêtera avant l’arrivée, au milieu d’un bois assez dense nous protégeant de la pluie, et où nous pourrons faire un feu (!!) qui nous remontera pas mal le moral.

 

On rentrera le 4ème jour dans l’après-midi, bien contents tout de même de notre petite aventure, et aussi contents de retrouver la chaleur du refuge ! On se fera plaisir le soir même avec un festin à l’auberge de Ute, savourant une salade de crabes royale avec un bon verre de vin rouge.

 

 

Le départ

 

Il est aussi difficile de partir de Puerto Williams que d’en arriver. Les conditions des derniers jours ayant suspendues tous moyens d’arriver ou de quitter l’île (avion ou bateau), on se retrouve chargés dans le refuge, les couples obligés de partager les lits simples, et les derniers arrivés dormant sur les banquettes du salon… Les ferrys étant pleins pour les 2 prochains voyages, on se retrouvera finalement avec des billets d’avion pour le mardi suivant, ce qui n’est pas si mal étant donné que les prochaines places étaient pour le 26 décembre

 

La mamita de la laverie avec sa belle calculatrice !!!

La mamita de la laverie avec sa belle calculatrice !!!

Nous aurons donc 3 jours, à profiter de la tranquillité de Puerto Williams, et de la chaleur des gens ici. La simplicité et la tranquillité de la vie donnent une dimension de bout du monde, sans internet et loin du reste du monde. Un vrai régal, comment auraient été nos vies ici ? Quel parcours suit-on ? Ce qu’on peut en dire, c’est les gens sont d’une gentillesse démesurée, à tel point que l’on n’a plus envie d’en partir.

 

Pour calmer la tension grandissante des gens du refuge bloqués sur l’île et ayant des impératifs (vols, réservations, etc…), Cecilia organisera un grand barbecue où tout le monde apportera sa touche. Grande réussite qui permettra de détendre l’atmosphère (nous, on n’était pas tendus), d’échanger avec tout le monde et le far breton aux pruneaux de Nolwenn aura conquis le bout du monde !!

 

On profitera d’une journée sans nuage (ou presque) pour aller à Cero de la Bandera, un point de vue surplombant Puerto Williams, donnant une panoramique sur tout le canal, avec en prime un immense drapeau chilien flottant au vent, rappelant que cette terre est bien la leur. QUE VIVA CHILE MIERDA !!

Panoramique de la vue à la bandera Chilena !

Panoramique de la vue à la bandera Chilena !

La bandera Chilena et Puerto Williams derrière

La bandera Chilena et Puerto Williams derrière

Ce chemin est également la première étape du trek des Dientes, ce qui nous permettra d’apprécier la vue sur la chaine au soleil.

L'amour est dans la montagne !

En rentrant, la chaleur se fait plus intense, et on se retrouve agréablement en tee-shirt ! Il y a vraiment les 4 saisons en même temps ici …

 

Notre avion pour Punta Arenas

Notre avion pour Punta Arenas

Le jour J, on se prépare et Cecilia nous ramène jusqu’à l’aéroport, où un bi-moteur de 15 places devra nous ramener jusqu’à Punta Arenas. Les aurevoirs sont tristes, mais on promet à Cecilia qu’on reviendra, ce qu’on fera !! Nouvel objectif de Manu : se refaire un genou, et faire le circuit des Dientes !!

 

 

 

Article écrit à Puerto Natales, la veille de notre départ en trek dans le parc national de Torres del Paine où nous passerons Noël dans la tente !!

9 commentaires

  1. Fanny D   •  

    bande de grands et joyeux malades des randos humides :)
    bizz bizz et chouette année à vous…

    • Manu et Nolwenn   •     Auteur

      Merciiiiii! Oui il nous arrive de nous demander s’il n’y a pas quelque chose qui a sauté la haut parfois… 😉 bonne année a toi aussi!!!

  2. jj   •  

    ça, c’est l’aventure!!!! Je vous reconnais!
    Bises

  3. je suis Charlie   •  

    Je ne sais si vous êtes au courant de l’actualité Française. Un affreux événement nous touche profondément et nous unis tous contre ces fous.
    Dès que vous le saurez, car je sais que ou vous êtes , il n’y a peut être même pas d’électricité, vous serez choqués comme nous . Je pleins les parents de ces être fous et leurs familles d’avoir engendrer des monstres!
    Leur consciences ne sera jamais plus en paix. J’avais besoin de vous le dire, aimez la vie et aimez les hommes!
    Nous sommes tous Charlie unis contre ces bêtes.

    • Manu et Nolwenn   •     Auteur

      Oui, nous avons su et suivi, choqués également. Ici ca a fait la une de toutes les chaînes TV argentines, chiliennes et péruviennes (celles qu’on a vu du coup). On suit les évolutions dès que le réseau nous le permet. Ca parait un peu irréel au fin fond des villages de la carretera austral, qui ont environ 500-900 habitants… On pense à vous.

  4. Christelle   •  

    Un petit conseil, avant de rejoindre un jour le sol francais, Manu, pense te raser…
    Enfin, en attendant, comme je suis fan de votre actualité, je vous envoie encore mes voeux de bonne annee…
    J attends avec impatience votre nouvel article

    • Manu et Nolwenn   •     Auteur

      Oui j’ai vu qu’il n’avait pas la côte en ce moment. Dommage d’ailleurs, elle me sert bien ici avec le froid :)
      Merci pour ton message encore, et de savoir que tu nous suis, ça nous motive à continuer à essayer de partager au mieux notre voyage.
      J’espère que tout va bien de ton côté.
      Manu

      • Leclef christelle   •  

        Je loupe aucun épisode!!!
        Je suis trop contente d admirer toutes les merveilles du monde que vous nous offrez en découverte…
        C est enrichissant car en dehors des belles photos nous devoilant les merveilles de lere nature, vous postez des temoignages et des renseignements historiques ou geologiques ou autres tres interressantes!
        On est rassuré de vous savoir bien tout en recevant une dose de culture!!!!
        Je ne sais pas encore comment vous dire merci, car une fois de plus Manu, j apprends beaucoup grace à toi!
        T es de loin le meilleur responsable que j ai eu et personne ne t arrive à la cheville…
        Je suis fiere d avoir un jour travaillé sous tes ordres et l aventure que tu nous partage est une belle lecon!
        Continuez de partager on est de tout coeur avec vous!

        • Manu et Nolwenn   •     Auteur

          Wouaw, je n’en attendais pas tant ! Mais cela me va droit au coeur, merci beaucoup.
          Les renseignements que l’on partage sont en fait les questions que l’on se pose nous même pendant le voyage. Mais pourquoi ci ? Et pourquoi ça ?
          Alors on cherche les réponses pour nous, et puis quand on écrit nos articles, on se dit : bah tant qu’à faire, autant partager nos recherches, cela permet d’expliquer et de compléter le récit.

          Ca a été un plaisir de collaborer avec toi aussi, tu le sais. Qui sait, peut-être que nous aurons un jour à nouveau l’occasion de travailler ensemble 😉

          Prend soin de toi, et de ta belle famille, c’est ce qu’il y a de plus important.

          A bientôt.

          Manu

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